Le pour et le contre du partage de nos performances sur les réseaux sociaux

Le pour et le contre du partage de nos performances sur les réseaux sociaux

Published : - Categories : Société

Par Manon Barré ©La Settimana

Que celui ou celle qui n’a jamais publié fièrement son entraînement du jour sur les réseaux sociaux lève la main. Et que celui ou celle qui n’est jamais tombé·e par hasard sur un post de la sorte se fasse connaître. Personne ? Rien d’étonnant à cela. Il faut dire que ce quelqu'un, s’il existe, nous vient probablement d’un autre temps !

En effet, il est aujourd’hui quasiment impossible de passer outre ces publications indiquant en détails le nombre de kilomètres effectués au cours d’un entraînement, à quelle vitesse, et sur quel parcours. Mais ce narcissisme sportif est-il véritablement sain ou comporte-t-il ses limites ? Nous avons souhaité en avoir le cœur net, et c’est en laissant de côté nos a priori sur le sujet, et il faut l’avouer, notre ego aussi, que nous avons mené l’enquête.

Le pour du partage de nos performances sur les réseaux sociaux

Étant donné que nous pouvons tous·tes plaider coupables, autant commencer par les raisons qui nous ont un jour incité·es à exposer au grand jour les talents de gazelle qui sommeillaient en nous. En bon·nes narcissiques que nous sommes, et ces propos ne sont nullement péjoratifs, c’est un élan de fierté qui nous pousse à chaque fois à publier le récapitulatif d’un entraînement sur les réseaux sociaux.

La fierté de s’être mis·e au sport, d’avoir réalisé un temps record, ou encore d’avoir borné comme il se doit lors de la traditionnelle sortie du dimanche (coucou les #weekendwarriors). Une fierté qui nous dépasse, et dont nous estimons qu’elle mérite d’être rendue publique. Une fierté grandement satisfaite à coups de “bravo ????????”, “machine ????”, “impressionnant ????”. Une fierté qui bombe les torses et fait se redresser les mentons. Ces mots vous dérangent peut-être, plus ou moins, à mesure des vérités qu’ils révèlent, des vérités qui n’ont rien d’insultant, qu’on se le dise. 

Partager nos performances sur les réseaux sociaux stimule ! Cela nous permet de nous challenger en reproduisant l’entraînement d’un·e autre sportif·ve en cherchant à le·a surpasser. C’est faire la course, sans pour autant prendre un départ, chose dont 2020 nous privera. Et en courant contre les autres lorsqu’ils ne sont pas là, c’est à courir contre nous-même que nous apprenons. Nous nous dépassons, en ne nous avouant que trop rarement que notre principal adversaire n’est autre que nous-même, et c’est en cela que partager nos performances sur les réseaux sociaux est magique.

C’est en cherchant à nous impressionner (et aussi à impressionner autrui, soyons honnêtes), à faire mieux que les autres et que nous-même, à aller plus vite et plus longtemps, que nous progressons. C’est en cherchant à connaître davantage nos capacités, à être curieux·ses des autres et de nous-même, que nous allons à la rencontre (via les publications d’autrui) de nouveaux parcours, et de nouveaux·elles compagnon·gnes d’entraînement. C’est en cherchant à montrer ce que nous avons dans le ventre que nous incitons les non-initié·es à la découverte du sport et à se jeter dans le grand bain. Parce qu’apprendre à nager, à faire du vélo, de l'haltéro ou à courir n’est qu’une question de déclic, pourquoi ce dernier ne passerait-il justement pas par un simple clic ?

Le contre du partage de nos performances sur les réseaux sociaux

Si les réseaux sociaux concourent à la valorisation de soi, l’inverse est aussi vrai par l’usage un brin bancal que nous en faisons. Et pour cause, en ne partageant presque exclusivement que les performances que nous jugeons dignes d’être connues et en cherchant à nous exposer à tout prix dans la performance et dans la qualité, c’est une image faussaire que nous diffusons autour de nous. Un brouillon de la réalité, certes pimpant, mais un brouillon quand même. Nous choisissons de nous présenter en position de force, de nous dévoiler sous notre meilleur jour, ce qui ne représente justement qu’un seul jour, pas notre quotidien.

En ne sélectionnant minutieusement que les entraînements qui nous valorisent, nous risquons potentiellement de créer un mal-être chez l’autre qui ne voit que ce que nous voulons bien lui montrer. D’autant plus que ce n’est pas parce que nous nous trouvons dans la forme de notre vie que nous devons nous sentir missionné·es d’en informer la terre entière. Savoir nous contenter de nous-même, d’une fierté sans artifices, sans reconnaissance, sinon la nôtre, est essentiel. En ne divulguant publiquement que les performances dont nous sommes fier·ères, nous poussons inconsciemment l’autre à les considérer comme étant la norme, et donc, à se comparer à nous, à une norme qui est la nôtre, pas la leur. Faire abstraction de ce qu’autrui agite sous notre nez demande du recul et une grande capacité de recentrage, ce dont trop peu de personnes sont capables. 

Et puis, publier à tout-va, c’est aussi peut-être finalement oublier pourquoi faisons-nous du sport : certainement pas pour le montrer aux autres, c’est certain. S’exposer outrageusement s’apparente d’ailleurs à un manque d’humilité, et bien souvent, contrairement aux apparences, à un manque de confiance en soi. N’oublions pas que nous faisons du sport avant tout pour nous, pas pour que tout le monde le sache. Le sport vient du cœur, de l’intérieur, pas sous l’impulsion d’un ordinateur. 

En matière de partage de nos performances sur les réseaux sociaux, les arguments recevables ne manquent donc pas, mais pour trancher justement, nous dirons que (comme de nombreuses choses dans la vie) tout est une question d’équilibre.

Publier nos performances sur les réseaux sociaux et s’enquérir de celles des autres pour progresser, nous dépasser, découvrir, rencontrer, partager : oui. Publier nos performances sur les réseaux sociaux parce que notre unique dessein est de satisfaire une pseudo-quête de reconnaissance extérieure, et ne nous sentir vibrer qu’à travers le partage de performances dont nous savons qu’elles attireront l’admiration et l’envie : non. Partager, c’est donner pour donner avec le cœur, pas donner pour être adulé·e.

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